Comment les collectivités réinventent la Gestion de la Relation Citoyen ?

par | 24 mars 2025 | Innovation, Secteur Public

Gestion de la relation citoyen dans le secteur Public

Aujourd’hui plus que jamais, les organismes de la fonction publique doivent relever le défi du passage au numérique. L’ensemble des démarches et processus aux multiples ramifications que les administrations ont à traiter donnent lieu à une Gestion de la Relation Citoyen de plus en plus riche et complexe. Les démarches physiques cèdent la place aux opérations en ligne, avec bien souvent la nécessité de gérer un mélange d’étapes à la fois virtuelles et réelles. Handicapées par leur rigidité, les collectivités territoriales butent encore sur plusieurs aspects de cette transition, mais continuent de progresser, poussées par les projets gouvernementaux.

La Gestion de la Relation Citoyen, un enjeu pour la relation à l’administration

La gestion de la relation citoyen (GRC) par les administrations est comparable à celle que mettent en place les entreprises privées avec leurs clients : elle implique un grand nombre d’étapes et de processus permettant de traiter au mieux les demandes faites aux collectivités. L’introduction de démarches en ligne, l’amélioration du suivi des demandes et le passage par plusieurs canaux pour finaliser une démarche font partie des enjeux de cette relation, encore aujourd’hui complexe, entre le secteur public et les citoyens.

Initiée de longue date par les collectivités, la dématérialisation des procédures est plébiscitée par des utilisateurs habitués à traiter une grande majorité de démarches en ligne au quotidien. La mise en place ne se fait cependant pas sans mal : processus virtuels parfois défectueux, nécessité de passer par un guichet ou traitement par courrier postal en complément, réactivité très faible de certains organismes sont à la source de bien des insatisfactions.

Les collectivités, souvent décriées pour leur manque de dynamisme, ont beaucoup à gagner de la virtualisation complète de leurs processus. La relation au citoyen, encore médiocre, ne peut ainsi que s’améliorer. A la clé également, une meilleure mobilisation du personnel disponible et un nombre toujours plus bas de demandes à faible valeur ajoutée.

L’action publique 2022 : un bilan contrasté, une feuille de route prolongée

Lancée en 2017, l’initiative Action Publique 2022 a permis d’accélérer la mise en ligne de milliers de procédures (près de 2 500 selon la dernière revue interministérielle) et d’imposer, dans chaque ministère, un « référent transformation » chargé de porter le numérique. Le rapport d’évaluation publié fin 2023 souligne toutefois « un décalage significatif entre les ambitions initiales et l’appropriation réelle par les usagers » : seuls deux services sur trois disposent aujourd’hui d’un parcours 100 % dématérialisé et l’accessibilité demeure inégale sur le territoire.

Ce constat a conduit l’État à prolonger l’élan via la stratégie « Services Publics + » 2023‑2027, qui recentre les priorités sur :

  • la simplification de 20 « moments de vie » (perte d’emploi, création d’entreprise, etc.) ;

  • l’accessibilité universelle, y compris hors connexion ;

  • l’ouverture accrue des API publiques pour favoriser l’innovation partenariale.

Une gouvernance renforcée – pilotage par la Direction interministérielle du numérique (DINUM) et objectifs de satisfaction utilisateurs mesurés chaque année – doit, cette fois, ancrer durablement la culture « citoyen d’abord » et aider plus efficacement les collectivités à amorcer la transformation en profondeur.

Collectivités : des innovations qui se multiplient

La réflexion menée sur l’optimisation des démarches fait d’ores et déjà émerger des idées fort utiles. Le concept de « Dites-le-nous une fois », par exemple, pointe le problème très courant des déclarations redondantes et identiques demandées par de nombreux organismes publics. Celles-ci font perdre un temps précieux aux citoyens et entreprises qui vivent mal l’expérience, mais aussi aux collectivités, qui pourraient sans cela gérer leur temps plus efficacement. Nouveau travail sur les formulaires, échanges systématiques entre administrations et procédures en ligne permettront à terme d’alléger les démarches.

Les opérations virtuelles doivent également se multiplier dans les années à venir. Prises de rendez-vous sur site web, demandes de documents officiels (acte de mariage, de décès,…), inscriptions administratives ou paiements en ligne doivent permettre d’améliorer la disponibilité des personnels. Les collectivités œuvrent pour proposer des moyens efficaces de réaliser les démarches : sites plus ergonomiques, traçabilité efficace des demandes par mail, confirmations par SMS, mais aussi applications dédiées et fiables rassemblant les fonctions essentielles au citoyen. De nombreux éditeurs de logiciels comme Publik ou Blueway propose maintenant des solutions dédiées à la Gestion de la Relation Citoyen.

Au-delà des économies réalisées, l’objectif de ces améliorations est de rester à l’écoute des besoins des citoyens et d’offrir une expérience plus satisfaisante lors de toutes les démarches administratives : un projet ambitieux qui nécessite encore du temps et un investissement important mais qui s’accélère inexorablement, poussée par les progrès du numérique.

Quand l’IA générative réinvente la relation usager

Autre levier émergent : l’IA générative qui, bien utilisée, peut transformer le ressenti des administrés. Des collectivités expérimentent déjà des chatbots basés sur de grands modèles de langage pour :

  • Dépanner 24 h/24 sur des questions courantes (droits, pièces justificatives, échéances) et aiguiller vers le bon téléservice ;

  • Pré‑remplir intelligemment des formulaires grâce à l’analyse sémantique des documents déposés (ex. extrait K‑bis, justificatif de domicile) tout en signalant les pièces manquantes ;

  • Adapter le ton et le vocabulaire au profil et à la langue de l’usager, améliorant ainsi l’inclusivité numérique ;

  • Générer des comptes rendus clairs pour les agents, qui se concentrent alors sur la vérification et la décision plutôt que sur la saisie.

Encadrés par la DINUM et la CNIL, ces pilotes imposent une vigilance éthique (transparence des entraînements, protection des données sensibles) mais montrent déjà qu’un assistant conversationnel bien ciblé peut réduire de 30 % le temps de traitement moyen d’une demande, tout en faisant grimper de dix points la satisfaction déclarée. À mesure que les modèles s’enrichissent de données publiques de confiance, cette IA « compagnon citoyen » pourrait devenir la nouvelle porte d’entrée, simple, accessible et personnalisée, de l’ensemble des services publics.

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